Le hotu
À la suite introductions volontaires, mais malheureuses, le hotu, qui trouve son origine dans le bassin du Danube, a envahi progressivement toutes les rivières d’Europe de l’ouest. Cependant, la création de canaux entre bassins fluviaux est aussi responsable de l’expansion de ce poisson.
Poisson peu connu aujourd’hui, il est aussi peu aimé par la plupart des pêcheurs qui ont entendu parler de lui. On lui reproche le pillage de masse des frayères des autres espèces. C’est pourquoi il fit l’objet de nombreuses tentatives d’éradication en France dans les années 90. Pêches électriques, pêche au filet, grappinage lors des grandes concentrations saisonnières, toutes ces tentatives ont été vouées à l’échec. En effet, sa prolifération et ses capacités de reproductions sont trop importantes pour réussir à l’empêcher d’envahir nos eaux.
La solution semblait être en lien avec le problème : le hotu n’a pas de carnassiers capable de limiter efficacement sa population. En dehors du silure et des gros brochets trop rares, le seul qui soit en mesure de jouer ce rôle est le huchon. C’est un grand salmonidé originaire du même bassin du Danube et superbement sportif à pêcher. Malheureusement, celui-ci n’a fait l’objet que de timides tentatives d’acclimatation dans les Usses en Haute-Savoie.
Finalement, la population du hotu a régressé et il s’est fait plus rare jusqu’à avoir quasiment disparu de certains secteur autrefois bien pourvus.
Quoi qu’il en soit, le seul intérêt de la pêche du hotu reste son côté sportif. Car sa chair est farcie d’arêtes, mais sa défense est très vive dans les instants qui suivent le ferrage.
Nom scientifique :
Chondrostoma nasus ; famille des cyprinidés.
Noms communs ou régionaux :
aloge, âme noire, chiffe, faux mulet, nase, soffie, soiffe, suiffe…
Caractéristiques physiques du hotu
Le hotu possède un corps fuselé et recouvert d’écailles argentées avec quelques reflets métalliques. Ses nageoires inférieures sont teintées d’une couleur rose orangée. Quant à la bouche, celle-ci est très infère avec des lèvres tranchantes et un museau large. Sa taille moyenne est de 20 à 40 centimètre pour un poids d’1 à 2 kilogrammes. À noter qu’il existe une espèce voisine, le hotu méridional (soffie), qui est plus petite.
Reproduction
Le hotu fraie entre avril et mai, en eau courante. Principalement dans les zones peu profondes, sur fond de gravier ou de galets. Les femelles vont pondre de 50 000 à 100 000 œufs.
Habitat et niche écologique
En générale, son habitat de prédilection est la zone à barbeau. Mais il a colonisé de nombreux cours d’eau, remontant même sur certaines zones à truite. Il semblerait d’ailleurs qu’il soit assez fréquent qu’il morde aux lignes des pêcheurs à la truite (surtout ceux pratiquant au toc).
Comportement et nourriture
Le hotu est un poisson très grégaire, vivant en troupes compactes. D’ailleurs, on peut encore l’apercevoir en eau peu profonde grâce aux reflets argentés que font ses flancs lorsqu’il vadrouille à la recherche de nourriture. Malheureusement, celle-ci se compose d’œufs et d’alevins de toutes espèces. Mais aussi de vers, de larves de crustacés, d’insectes, de mousses et d’algues…
Modes de pêche du hotu
Méfiant et très versatile, ce poisson peut être assez déroutant à pêcher. En effet, il est capable de se laisser prendre en masse pendant un laps de temps, puis de refuser obstinément de se laisser prendre, parfois le jour d’après, et parfois quelques heures après…
On peut le pêcher à la ligne flottante, avec une canne simple de 5 ou 6 mètres. Ou alors, à l’anglaise, à la longue coulée, en utilisant des esches très diverses : vers de vase, de terreau, asticots, blé, mousse…
Quant à la touche, celle-ci est lente et profonde, et la lutte qui suit non dénuée d’intérêt, car le hotu oppose une belle résistance même si celle-ci est assez courte.
Grosse erreur sur ce poisson !
Non, le hotu ne mange pas les oeufs des autres poissons ni les alevins, c’est une vielle croyance de pécheurs que l’on sait aujourd’hui erronée. (Beaucoup de poissons ont été accusés de ce crime à tort et à travers, car à une certaine époque, tout poisson qui n’avait pas de valeur gustative ou commerciale devait être éliminé pour laisser place aux poissons désirés, et quand on veut éliminer un poisson, la tradition est de l’accuser de détruire les frais des autres poissons… le cas le plus caricatural car le plus faux est justement le hotu.)
Et pour cause, le hotu est les seul poisson de l’ichtyofaune française presque essentiellement végétarien ! C’est ce qui explique sa grande abondance par rapport aux autres poissons dans les milieux qu’il fréquente. Sa niche écologique ? Il utilise sa bouche suceuse en forme de bec pour racler les pierres et les galets du fond des rivières (et aussi les piles des ponts) pour consommer les micro-algues filamenteuses qui les recouvrent. C’est là sa principale ressource ! Il est aussi capable de sucer les petits mollusques à coquilles (gastéropodes et petits bivalves, surtout la moule zébrée, qui recouvrent ces mêmes galets), ce qui constitue presque sa seule nourriture animale. C’est ce régime qui explique qu’il est très difficile à pêcher même là où il est très abondant. On le prend le plus souvent par le dos ou une nageoire.
Ce poisson à deux qualités écologiques essentielles:
– La nourriture qu’il consomme est consommée presque exclusivement par lui, sa niche écologique est donc très spécifique. Il ne prend pas du tout la place des autres poissons mais s’ajoute à eux. Là où il y a du hotu, il y a globalement plus de poisson dans le milieu en biomasse car les autres espèces de poissons, qui ne consomment pas sa ressource, sont aussi abondantes avec ou sans hotu dans le milieu. La seule exception à cette règle est le toxostome du sud de la France, un poisson très apparenté au hotu, plus petit, qui occupe à peu près la même niche écologique et est donc en concurrence avec le hotu là où ce dernier est introduit. Mais dans les bassins fluviaux des deux tiers nord de la France où le toxostome n’est pas présent, le hotu est bien le seul à occuper sa niche écologique. Mais on a récemment remarqué que les niches écologiques du hotu et du toxostome ne sont pas identiques, et que ce dernier n’est donc finalement pas menacé là où le hotu a été introduit contrairement à ce que les scientifiques craignaient au début.
– C’est donc un poisson fourrage d’une grande utilité (là où il n’y a pas de chondrostome), une manne supplémentaire et très abondante qui s’ajoute aux autres poissons blancs, pour nourrir les brochets dont il peut augmenter l’abondance, mais aussi pour détourner les cormorans qui s’attaquent aux denses bancs de hotus en laissant un peu tranquilles les autres poissons. Il nourrit aussi le silure, et effectivement le huchon en Europe de l’Est.
Le hotu est un ancien mal aimé des pécheurs : il n’est pas bon à manger, et il est difficile à attraper malgré qu’il soit visible en abondance dans les cours d’eau transparents, il est donc frustrant. C’est ce qui explique toutes les accusations mensongères à son sujet, aujourd’hui surannés.
Bien cordialement 🙂
Un grand merci pour votre commentaire et toutes ces informations sur le hotu ! Nous avons à cœur le partage du savoir sur les poissons d’eau douce en général et nous accueillons avec joie tout ce qui vient compléter nos connaissances !
Si vous pouviez nous donner vos sources qui semblent bien plus récentes que les nôtres, nous vous en serions très reconnaissant et cela nous permettrait d’éviter ce genre d’erreur sur d’autres articles ^^
Je répond tard mais je répond quand même 🙂
Voici un document scientifique en français sur le hotu, que j’avais lu il y a quelques années sur papier et que je retrouve sur le net.
https://www.kmae-journal.org/articles/kmae/pdf/1997/01/kmae199734434522.pdf
Il y eu aussi pas mal d’études sur ce poisson en Allemagne et en Europe de l’Est, mais je ne maitrise pas l’allemand.
Merciiiii =)